Contester une sanction disciplinaire

Par Fabrice AllegoetLe 5 juillet 2015

Dans le cadre de son travail, le salarié peut être sanctionné s’il ne respecte pas d’une part les consignes de l’employeur ou de son supérieur hiérarchique direct et d’autre part, les obligations découlant de son contrat de travail ou des règles internes et conventionnelles liées à l’entreprise. Bref, il existe de multiples raisons possibles de sanctionner un salarié (article L1331-1 du code du travail). Ce dernier est plus que jamais exposé et doit être vigilant afin de ne pas entraver les règles les plus élémentaires (hygiène, sécurité, application de bonne foi de son contrat de travail…) comme les responsabilités inhérentes à ses conditions de travail.

La sanction peut être graduelle

Il existe plusieurs types de sanction ; de la moins préjudiciable (sanction mineure) à la plus pénalisante (faute grave à lourde). La qualification légale de la sanction disciplinaire est assez large mais les conséquences pour le salarié ne sont pas exactement les mêmes. Il faut donc savoir de quelle sanction fait-on l’objet pour déterminer si celle-ci est justifiée et proportionnelle à la faute commise.

En effet, la première raison d’une contestation puise sa source dans la disproportion que l’on peut parfois observer entre la gravité de la faute commise par le salarié et le degré de la sanction disciplinaire retenu par l’employeur. Certains salariés peuvent en effet estimer que l’employeur abuse de son autorité pour faire savoir au salarié son mécontentement.

Ainsi, l’employeur qui licencierait pour faute grave, un salarié qui aurait pris 5 minutes de pause supplémentaires alors que cela n’a pas outre mesure perturbé l’organisation du service, pourrait être appelé à revoir sa copie. La justice passe aussi par la justesse des choses et elle doit avant tout être raisonnable.

Précisons également que l’employeur ne peut pas prononcer une sanction disciplinaire alors que celle-ci n’a pas été prévue par le règlement intérieur de l’entreprise, obligatoire à partir de 20 salariés et plus  (Cass. soc. 12 décembre 2013, n° 12-22642).

Rappels à l’ordre et réprimandes verbales, ne sont pas des sanctions

Lorsque l’employeur ou l’un de ses représentants reprend un salarié en le réprimandant suite à l’inobservation d’une consigne par exemple, il ne s’agit pas à proprement parler d’une sanction. Ainsi, un employeur peut faire un rappel à l’ordre à un salarié qui commet un impair sans que cela ne l'oblige à respecter la procédure de notification d’une sanction disciplinaire. Il en est de même quand l’employeur adresse une lettre de rappel à l'ordre pour inciter le salarié à modifier son attitude (Cass. soc. 14 sept. 2010, n° 09-66.180). Dans un autre exemple, la justice n’a pas considéré l’envoi d’une lettre de mise en garde « se bornant à mettre en garde la salariée sur la portée de ses propos » comme constituant une sanction disciplinaire (Cass. soc. 5 juill. 2011, n° 10-19.561).

Il y a toutefois une limite à la remontrance écrite car l’employeur peut vite glisser dans ce qui est qualifiable de sanction mineure.

Ainsi, un courriel adressé à un salarié pour lui signifier très précisément des manquements aux règles et procédures internes tout en l’incitant vivement à s’y conformer afin de faire cesser ce qui a été à l’origine du message, est considéré par la justice comme une sanction équivalente à un avertissement écrit (Cass. soc. 9 avr. 2014, n° 13-10.939).

La sanction mineure doit être notifiée par écrit au salarié

L’employeur qui veut faire savoir au salarié, ce qui lui est reproché, peu importe la gravité de la faute commise, doit le faire nécessairement en lui adressant un courrier (article L1332-1 du code du travail). Autrement dit, au moment où l’employeur inflige une sanction disciplinaire même mineure (avertissement) au salarié, il est tenu  de l’informer par écrit des griefs retenus contre lui (Cass. soc., 29 mai 2013, n° 12-20.175). Évidemment, l’employeur doit largement s’expliquer sur ses motivations et sur les raisons qui le conduisent à sanctionner le salarié. Le courrier qui lui est adressé peut être remis en main propre contre décharge ou envoyé en recommandé avec avis de réception (article R1332-2 du code du travail).

Un entretien est nécessaire pour une sanction lourde

La notification d’une sanction plus lourde au salarié, ayant une incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l’entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié, doit se faire dans le cadre d’un entretien préalable (article L1332-2 du code du travail). Aussi, charge à l’employeur de convoquer le salarié en amont. En effet, l’entretien est nécessairement précédé de l’envoi d’une convocation remise en main propre contre décharge ou adressée au salarié par lettre recommandée ; il est précisé dans ce courrier, la possibilité pour le salarié de se faire assister lors de cet entretien (article R1332-1 du code du travail). Précisons car c’est important, lors de l’entretien, l’employeur doit présenter au salarié les motifs de la sanction envisagée, mais celui-ci n'est pas obligé de lui communiquer les éléments de preuve en sa possession (Cass. soc. 18 février 2014, n° 12-17557).

À l’issue de l’entretien, l’employeur communique par écrit, les éléments constituant la sanction disciplinaire retenue dans le délai de 2 jours ouvrables au minimum et de 1 mois au maximum après le jour fixé pour l’entretien (article R1332-2 du code du travail).

Je ne suis pas d’accord avec la sanction

Il se peut que le salarié ne soit pas en phase avec ce que l’employeur lui reproche. Possiblement, le salarié peut reconnaitre la faute mais estimer que la sanction est disproportionnée voire discriminatoire. Il peut aussi se plaindre de la procédure. Par exemple, celui-ci n’a pas été convoqué loyalement ou l’employeur ne lui a pas indiqué la possibilité pour lui de se faire assister. Il est important avant de s’engager dans une demande d’annulation de la sanction infligée par l’employeur, de rassembler toutes les preuves de sa bonne foi. C’est le point de départ indispensable.

Une fois ce travail réalisé, le salarié peut rédiger un courrier circonstancié dans lequel il explique les raisons de son désaccord et le pourquoi de sa demande d’annulation de la sanction. Il est préférable en amont d’une éventuelle procédure contentieuse devant les Conseil de Prud’hommes (CPH) de commencer par saisir l’employeur de sa plainte. Une résolution amiable est toujours préférable à une réponse judiciaire.

Si l’employeur n’est pas de l’avis du salarié et qu’il persiste dans son choix de sanction tandis que le salarié maintient sa plainte, il ne reste plus d’autres choix que de saisir le CPH (article L1333-1 du code du travail).

Auteur de l'article: Fabrice Allegoet

Fabrice ALLEGOET est un formateur confirmé et certifié en droit social qui s'est spécialisé dans différentes matières (santé et sécurité au travail, RSE et développement durable, management et communication en entreprise). Il est l'animateur des Podcasts "Le CSE En Clair" et "Le Droit de Savoir by CÉOS".