Qu’est-ce que le bulletin de paie électronique ?

Par Florian BenoistLe 3 octobre 2019
droit du travail

20%, c’est le nombre de salariés français recevant aujourd’hui un bulletin de paie électronique (58% se disent pourtant favorables). Malgré la mise en place du compte personnel d’activité (CPA), la fiche de paie électronique peine à prendre son envol.

Question

Mais est-ce que la dématérialisation des bulletins de salaire présente réellement des avantages ?

Bulletin de paie électronique : définition

Dématérialiser un bulletin de salaire, c’est tout simplement convertir une fiche de paie physique vers une version numérique. Il se présente sous la forme d’un document numérisé en format PDF. Première chose à savoir : la fiche de paie électronique n’est absolument pas obligatoire. Pour l’employeur comme pour le salarié. Ce qui veut dire que tout employé, qui refuse cette solution de dématérialisation, peut demander à conserver la remise du bulletin sous format papier.

Mis en place depuis le 1er janvier 2017, le bulletin de paie dématérialisé a vu sa progression boostée par la loi Travail du 8 août 2016.

En effet, l’employeur n’a plus besoin de demander l’accord du salarié pour passer au bulletin de paie électronique. Comme expliqué ci-dessus, c’est donc à l’employé de faire part de son opposition à tout moment, au préalable ou a posteriori. Jusqu’au 1er janvier 2017, c’était une toute autre histoire : l’employeur devait expressément obtenir l’autorisation de son salarié avant de passer à la dématérialisation des bulletins de salaire. Avec la clarification du droit et la loi El Khomri, l’employeur se contente maintenant d’informer par tout moyen le salarié, un mois avant la première émission du bulletin de paie dématérialisé (ou au moment de l’embauche).

La France et le bulletin de paie dématérialisé

En 2015, 15% des bulletins de salaire étaient remis aux salariés de manière électronique. C’est moins que l’Allemagne ou la Grande-Bretagne qui affichent respectivement un taux de 95% et 73%. En 2019, le taux atteint difficilement les 20%. C’est pourquoi 80% des salariés français reçoivent toujours leur fiche de paie au format papier. Heureusement, l’engouement autour du projet de digitalisation commence à prendre de l’ampleur, mais beaucoup s’interrogent encore sur les avantages et inconvénients du BPE (comprenez bulletin de paie électronique).

Avantages et inconvénients de la fiche de paie électronique

La première idée qui peut nous venir en tête, quand on pense au bulletin de paie électronique, c’est forcément la fin du papier. Mais est-ce véritablement le seul avantage que nous apporte la dématérialisation de la fiche de salaire ? Et au niveau des inconvénients, qu’en dit-on ?

Les avantages du bulletin de paie dématérialisé

Les avantages du bulletin de salaire numérique se divisent en trois points sur le plan :

  • écologique ;
  • organisationnel ;
  • économique.

Gain de temps et limitation des consommables sont indéniablement les grands gagnants de la fiche de paie dématérialisée. Du côté des employés, c’est la facilité du stockage des données qui remporte la palme. Mieux, le BPE n’est pas falsifiable du fait de sa signature électronique. On peut aussi compter sur une meilleure gestion du temps du côté des ressources humaines : mise sous pli ou encore classement des documents administratifs sont de l’histoire ancienne. En termes d’image et de culture d’entreprise, le bulletin de paie électronique confère des valeurs éco-responsables aux entreprises qui ont opté pour cette solution de dématérialisation.

N’oublions pas les économies durables qui peuvent être réalisées : aujourd’hui près de 500 millions de fiches de paie prennent la voie postale tous les ans.

Prix du timbre, impression et distribution sont donc à imputer aux charges de l’entreprise. Quand on sait qu’un bulletin de paie coûte aujourd’hui entre 1 à 3 euros à une entreprise, les enjeux économiques sont réellement de la partie.

Les inconvénients du bulletin de paie numérique

La digitalisation des entreprises n’est pas au goût de tous, et nombreux sont ceux qui jugent superflue la dématérialisation des bulletins de paie. C’est surtout une question de priorités pour les employeurs, qui n’estiment pas cette démarche absolument nécessaire. En réalité, la transformation digitale des bulletins de paye ne présente pas de réels inconvénients, mais plutôt des freins psychologiques pour la plupart des employés. Souvent par peur de la nouveauté, des réticences se créent principalement dans les secteurs professionnels du BTP ou de l’industrie.

Par ailleurs, la simplicité avec laquelle il est possible de refuser le bulletin de salaire dématérialisé ne facilite pas son déploiement.

Que dit la loi sur le bulletin de salaire numérique ?

Bien entendu, la loi veille au grain en ce qui concerne le bulletin de paye électronique. C’est pourquoi elle s’engage à encadrer l’intégrité des données, la confidentialité, la disponibilité et l’accessibilité. Petite explication pour mieux comprendre les enjeux juridiques autour du BPE !

L’intégrité des données personnelles

Protéger les données est au cœur de chaque projet de digitalisation. D’ailleurs, la valeur légale d’un BPE repose surtout sur l’intégrité des données : sont ainsi obligatoires la mise sous scellé par CEV (Cachet Électronique Visible) et la signature numérique et le cryptage.

La confidentialité des données

Non, on n’envoie pas le bulletin de paie dématérialisé par mail comme on envoie une lettre par la Poste. Le BPE doit être transmis de manière sécurisée, et même être déposé dans un espace sécurisé (CPA – Compte Personnel d’Activité) ou un coffre-fort électronique.

La disponibilité et l’accessibilité

Deux possibilités sont offertes à l’employeur, en matière de disponibilité des données personnelles soit :

  • pendant une durée de 50 ans ;
  • jusqu’aux 75 ans du salarié*.

*Ici, on ajoute 6 ans à l’âge maximal de mise à la retraite, comme précisé dans l’article L1237-5 du Code du travail.

En cas de cessation d’activité de l’entreprise (ou si le coffre-fort numérique prend fin), l’employeur informe le salarié, 3 mois avant la fermeture de son espace sécurisé. Toute fiche de paie électronique doit également être consultable depuis un CPA (compte personnel d’activité). Cette plateforme réunit le compte personnel de formation, le compte d’engagement citoyen et le compte professionnel de prévention.

Les choses qui ne changent pas avec le BPE

Les règles pour un bulletin de paie électronique (BPE) sont exactement les mêmes que pour un bulletin de paie classique. Il est des mentions obligatoires auxquelles ne peut déroger l’entreprise, à savoir :

  • le nom et l’adresse de l’employeur, SIRET et autres ;
  • les informations du salarié ;
  • la référence de l’organisme URSSAF ;
  • le nombre d’heures travaillées ;
  • le montant brut et net de la rémunération, etc.

En résumé, rien ne change, si ce n’est seulement la façon de transmettre le bulletin de paie. Les sanctions restent également similaires en cas de non-remise du bulletin de paie électronique. L’employeur risque donc une amende de 450€ par fiche non remise, et peut être forcé à verser des dommages et intérêts au salarié.

Alors, pour ou contre le BPE ?

Ce sont surtout les freins psychologiques qui se heurtent au déploiement du bulletin de salaire électronique. Les avantages sont en effet nombreux sur le plan écologique, économique et organisationnel. Malgré tout, chefs d’entreprise et salariés continuent à se méfier de cette solution de dématérialisation, bien que des projets plus risqués comme le prélèvement à la source ont pourtant intégré les mœurs aujourd’hui. De manière générale, le concept séduit les Français, et de nombreux éditeurs de logiciels se lancent sur le marché du bulletin de salaire numérique.

Reste à sauter le pas et cesser d’avoir peur de la transformation digitale !

Auteur de l'article: Florian Benoist

Juriste en droit social depuis 5 ans, Florian est un jeune dynamique et talentueux qui a œuvré dans différents cabinets d’avocats avant de prendre son envol en tant qu’autoentrepreneur. Il est désormais consultant et formateur à son compte et travaille notamment pour des TPE, associations, syndicats et des comités d’entreprise.