Intérêt et garanties du contrat de mission

Par Adrien KrasLe 20 mars 2018

Face à une évolution du monde du travail vers toujours plus de flexibilité, le contrat de mission intérimaire a le vent en poupe ! Ces dernières années ont en effet été marquées par un véritable boom de l'activité des agences d'intérim et le travail temporaire n'est plus forcément envisagé à travers le seul prisme de la précarité. Quel est donc l'intérêt de ce type de contrat ? Quelles garanties présente-t-il ?

Avant de répondre à ses questions, commençons par préciser ce qu'il est… et ce qu'il n'est pas ! 

Qu'est-ce qu'un contrat de mission ?

Ce terme est souvent utilisé dans le langage commun pour désigner indifféremment plusieurs types de contrats pourtant bien distincts. En droit du travail, cependant, l'expression sert exclusivement à désigner le travail temporaire ou intérim. Le contrat de mission doit donc être distingué, notamment, du contrat de chantier.

Ce dernier est un CDI conclu pour une durée ne pouvant être fixée à l’avance, mais dont le terme correspond à la réalisation de travaux précis.

Le domaine du contrat de chantier est particulièrement restreint puisqu'il ne concerne que certains secteurs d'activité (aéronautique, cinéma…) ou branche dans laquelle un accord collectif spécifique a été conclu (article L1223-8 du Code du travail). Maintenant que le cadre a été posé, penchons-nous plus en avant sur le régime du contrat d'intérim…

Principe et avantages du contrat de mission intérimaire

Le principe du travail temporaire consiste, pour une agence d'intérim, à mettre à disposition d'une entreprise dite « utilisatrice » un salarié en vue de l'exécution d'une mission précise. Le mécanisme de l'intérim repose ainsi sur une double relation contractuelle. L'agence d'intérim conclut d'abord un contrat de mise à disposition avec l'entreprise utilisatrice, puis un contrat de mission avec le salarié intérimaire (article L1251-1 du Code du travail). En général, la collaboration entre le salarié intérimaire et l'agence d'intérim s'inscrit sur le long terme. C'est d'ailleurs l'un des avantages de ce dispositif : le salarié n'a pas à rechercher activement ses missions puisque l'agence les lui propose !

Avis d'auteur

L’intérim est par ailleurs particulièrement prisé des jeunes peu expérimentés ou des personnes de retour sur le marché du travail après une période d’inactivité.

Il permet en effet de multiplier les expériences, de tester divers métiers, voire de se construire un réseau professionnel. D'autant plus que l'intérimaire est libre d'accepter ou non les missions proposées ! Enfin, il n'est pas rare qu'une succession de mission au service d'une même entreprise utilisatrice conduise à la conclusion d'un CDI…

Régime juridique du contrat de mission

Le contrat de mission, comme le contrat de mise à disposition, comporte un certain nombre de stipulations obligatoires (articles L1251-16 et L1251-43 du Code du travail) : motifs du recours, durée de la mission… Ces clauses visent principalement à s'assurer que les garanties prévues par la loi sont bien respectées. À noter que, pour donner suite à la dernière réforme du Code du travail et depuis le 24 septembre 2017 un accord de branche étendu peut aménager certaines modalités du contrat intérimaire (durée maximale, nombre de renouvellements, délai de carence…). Veillez donc à consulter la convention collective applicable à l'entreprise utilisatrice !

Cas de recours du contrat de mission

Le recours au contrat de travail temporaire n'est possible que s'il s'agit de pourvoir un poste répondant à un besoin précis et temporaire de l'entreprise utilisatrice. La conclusion d'un contrat d'intérim doit donc être justifiée par l'un des motifs suivants :  remplacement d'un salarié absent, accroissement temporaire d'activité et emploi saisonnier, complément de formation ou embauche dans le cadre d'un dispositif d'insertion professionnelle (articles L1251-6 et -7 du Code du travail).

Durée et renouvellement du contrat de mission

En principe, la durée maximum du contrat de travail temporaire est de 18 mois. Dans certains cas exceptionnels et limitativement énumérés par la loi (mission à l'étranger…), cette durée peut être raccourcie à 9 mois ou prolongée jusqu'à 24 mois (article L1251-12-1 du Code du travail).

Conseil d'Expert

Attention : ces durées maximales tiennent compte des éventuelles prolongations !

La mission initiale est en effet susceptible de faire l'objet de deux renouvellements. Le contrat de mission doit prévoir les conditions du renouvellement. À défaut, un avenant de renouvellement doit obligatoirement être signé avant le terme de la durée initial (article L1251-35-1 du Code du travail)

Délai de carence entre deux contrats

La conclusion de deux contrats successifs sur un même poste de travail est prohibée, sauf à respecter un délai de carence entre les deux prises de poste. Certaines situations peuvent cependant justifier une dispense de délai de carence (article L1251-36 du Code du travail) : nouvelle absence du salarié remplacé, emploi saisonnier… En principe, ce délai de carence est égal au tiers de la durée du contrat ou à la moitié si cette durée est inférieure à 14 jours. Il est apprécié en se référant aux seuls jours d'ouverture de l'entreprise (article L1251-36-1 du Code du travail).

Par exemple, si les bureaux sont ouverts du lundi au vendredi, le week-end ne sera pas pris en compte.

Conditions de travail et rémunération

Le salarié intérimaire bénéficie des mêmes conditions de travail que ses collègues en poste dans l'entreprise utilisatrice. L'entreprise utilisatrice et l'agence d'intérim sont notamment tenues d'une obligation de sécurité conjointe à l'égard du salarié intérimaire (Cass. Soc. 30 novembre 2010 n°08-70.386). De même, la rémunération de l'intérimaire ne peut pas être plus basse que le salaire que toucherait un salarié identiquement qualifié, employé par l'entreprise utilisatrice à un poste analogue de travail. Le travailleur temporaire a également droit à une indemnité compensatrice de congés payés au titre des missions effectuées.

Au-delà de ces garanties, le contrat de mission présente un intérêt pécuniaire certain pour le salarié.

Celui-ci perçoit en effet à chaque fin de mission une indemnité égale à 10% du montant brut de la rémunération globale versée au titre de la mission (article L1251-32 du Code du travail).

Rupture anticipée du contrat de mission

En principe, le contrat de travail temporaire est automatiquement rompu une fois son terme échu. Il arrive toutefois que cette rupture intervienne de façon anticipée. Cela peut-être du fait de l'entreprise de travail temporaire. Celle-ci doit alors proposer au salarié une nouvelle mission dans les 3 jours ouvrables suivants. Cette nouvelle mission doit correspondre aux mêmes conditions que la précédente : rémunération, temps de trajet… Bon courage ! À défaut, ou si la durée de la nouvelle mission est inférieure à la précédente, l'intérimaire a droit à l'intégralité de la rémunération à laquelle il aurait pu prétendre jusqu'au terme du contrat initial.

Cette obligation de « reclassement » sur une autre mission n’a toutefois pas lieu d’être en cas de faute grave de l’intérimaire ou de force majeure.

À noter toutefois que même la rupture du contrat liant l'entreprise utilisatrice à l'agence d'intérim n'est pas considérée comme un cas de force majeure (Cass. Soc. 9 juillet 2003 n°01-41.326). Dans l'hypothèse où le salarié serait à l'origine de la rupture, il s'expose à verser à l'entreprise de travail temporaire des dommages et intérêts visant à réparer le préjudice subi (perte du client…). L'intérimaire demeure toutefois libre de rompre le contrat de mission s'il est en mesure de démontrer qu’il a accepté une embauche en CDI. Il doit alors respecter un délai-congé (préavis) dont la durée, comprise entre un jour et deux semaines, est fonction de la durée totale du contrat (article L1251-28 du Code du travail). Ainsi, malgré son caractère précaire, le contrat de mission n'est pas sans garanties et avantages pour le salarié et devrait le demeurer pour quelques années encore malgré la réforme du 22 septembre 2017.

En effet, si des aménagements conventionnels sont désormais possibles, le législateur a pris soin de verrouiller les principaux attraits et garde-fous attachés à ce statut : limitation des motifs de recours et indemnité de fin de contrat.

Auteur de l'article: Adrien Kras

Titulaire d’un Master 2 en Droit et du Certificat d’Aptitude à la Profession d’Avocat, Adrien KRAS a prêté sa collaboration au sein de divers cabinets au service d’une clientèle de particuliers et d’entreprises de toutes tailles. Spécialisé en droit social, il exerce actuellement en qualité de juriste conseil au sein d’une organisation professionnelle.