Les salariés dans le cadre de leur activité professionnelle sont conduits parfois à avancer des frais au nom de leur entreprise. Ces derniers ont donc vocation à leur être remboursés par l’employeur. Existe-t’il un cadre précis régissant le fonctionnement des notes de frais ? Les salariés sont-ils toujours tenus d’avancer ces frais ? Selon les métiers, la nature du poste, le niveau de responsabilités et les conditions de travail des salariés, le montant des notes de frais peut atteindre chaque mois des sommes importantes. L’employeur peut-il refuser d’en assumer le paiement intégral in fine ? Il ne faut pas du reste, confondre « avantages en nature » et « frais professionnels ».
Origine des frais professionnels
Ces frais sont engagés par le salarié non par convenance personnelle, mais pour répondre à un besoin inhérent à une mission d’ordre professionnel. Il faut entendre juridiquement et comptablement qu’il s’agit de charges spéciales propres à l’accomplissement d’une mission exigée par l’entreprise (arrêté du 20 décembre 2002, art. 1er, JO du 27).
En l’absence de dispositions légales précises à ce sujet, c’est la jurisprudence qui a régulièrement encadré la pratique des frais professionnels.
Ainsi, est posé comme principe général que ceux-ci, lorsqu’ils sont avancés par le salarié pour les besoins de son activité professionnelle et dans l’intérêt de l’employeur, il appartient obligatoirement à ce dernier d’en assurer le remboursement pour autant que le salarié soit en mesure de justifier précisément la nature et le montant des dépenses (Cass. soc. 21 mai 2008, n° 06-44044).
Distinction avec les frais d’entreprise
Contrairement aux frais professionnels visés ci-avant, les frais d’entreprise correspondent à des dépenses qui relèvent de l’activité de l’entreprise ; ils ne sont donc pas liés directement à la réalisation de la mission rattachée notamment à la profession du salarié.
C’est l’administration qui a premièrement défini cette nuance dans l’appréciation dont peuvent faire l’objet certains frais engagés et supportés par l’employeur. Elle a été renforcée par une réponse du Conseil d’État reconnaissant à juste titre cette réglementation portant sur l’existence de frais d’entreprise et échappant à l’assiette des cotisations sociales (CE 29 décembre 2004, n° 254832).
Les frais professionnels sont remboursés
Il n’est pas pensable alors que le salarié exécute à la demande de son employeur, une mission nécessitant des frais qu’il faut avancer, que ceux-ci ne puissent pas être remboursés. Aussi, les frais réellement engagés par le salarié dans le cadre de son activité professionnelle doivent lui être remboursés sans qu’ils puissent être imputés sur sa rémunération (Cass. soc. 25 mars 2010, n° 08-43156).
Il est en revanche impératif de vérifier ce qui est précisé si cela est le cas dans son contrat de travail.
Certaines entreprises prévoient à l’avance une somme forfaitaire en prévision des frais que pourrait engager le salarié de sorte à lui laisser une autonomie financière. Si cette pratique est licite en soi, elle doit toutefois observer une limite là encore posée par la jurisprudence.
L’employeur peut ainsi verser une somme fixée à l’avance de manière forfaitaire, à la condition, d’une part, que cette somme forfaitaire ne soit pas manifestement disproportionnée au regard du montant réel des frais que devra engager le salarié, et, d’autre part que la rémunération de celui-ci ne soit pas en finalité inférieur au salaire minimum (Cass. soc. 20 juin 2013, n° 11-23071).
Modalités de remboursement des frais professionnels
Il est couramment observé pour le traitement des remboursements de frais par l’employeur, que ceux-ci sont réalisés sous la forme d’un paiement des sommes réellement dépensées par le salarié. Le remboursement se fait alors sur présentation des justificatifs, notamment des factures en bonne et due forme. Les entreprises mettent à disposition le plus souvent un formulaire type appelé « note de frais » afin de faciliter l’inventaire des dépenses engagées par le salarié.
Il est essentiel de tenir compte pour le remboursement des frais exigibles par le salarié, qu’il peut être tenu par le biais d’une disposition contractuelle de présenter une note de frais à l’employeur. Si cela n’a pas été le cas, le remboursement ne peut être expressément exigé. Le salarié n’aura en effet pas rapporté la preuve sur la base de justificatifs, des frais supportés par lui (Cass. soc. 5 nov. 2014, n° 13-14230).
Moins courant, le remboursement de certains frais peut se faire sous forme d’allocations forfaitaires. C’est souvent le cas pour les salariés itinérants par exemple, exposés à payer des repas d’affaires, à utiliser leur véhicule personnel pour des déplacements professionnels…
Il y a tout de même des limites car la plupart des forfaits sont encadrés par l’administration qui fixent des plafonds d’exonération de cotisations sociales étant entendu que ces sommes ne sont pas compte tenu de leur nature considérées comme un complément de salaire.
Délais et prescriptions des remboursements
Les entreprises fixent en général un cadre qu’il est important de respecter. Les salariés doivent pour être remboursés, produire en temps les justificatifs à l’employeur afin que celui-ci puisse les valider et les porter au paiement.
Lorsqu’il est indiqué dans une note de service et/ou dans son contrat de travail que le salarié dispose d’un mois pour être remboursé de ses frais, au-delà, l’employeur ne serait plus fondé à procéder à un quelconque remboursement (Cass. soc. 29 sept. 2009, n° 07-45722).
Par ailleurs, depuis l’entrée en vigueur de la loi de sécurisation de l’emploi du 4 juin 2013 (LOI n°2013-504 du 14 juin 2013 – art. 21), un salarié ne pourrait plus exiger le remboursement de ses frais comme tout élément inhérent à son salaire au-delà de 3 ans à compter du jour où celui-ci a eu connaissance de la façon d’être payé de ces sommes (article L3245-1 du code du travail).
L’employeur peut limiter les avances de frais professionnels
Soucieuses de mieux encadrer les frais professionnels et d’en maîtriser davantage les coûts, un certain nombre d’entreprises n’hésite plus à recourir à des procédés qui évitent aux salariés d’avancer les frais tout en étant assuré pour l’employeur de la justification des sommes engagées.
Ainsi, les salariés itinérants disposeront d’un véhicule de service avec une carte carburant (ce qui exonère l’employeur de payer des frais kilométriques) ; les véhicules peuvent être équipés d’un boîtier propre aux péages afin que chaque passage comptabilisé, soit directement facturé à l’entreprise. Certains salariés disposent également d’une carte de paiement au nom de l’entreprise (carte affaires) pour assurer les frais de bouche lorsqu’ils invitent leurs clients. Des entreprises choisissent également de sous-traiter les réservations de billets de train ou d’avion et les nuitées d’hôtel ; ainsi, les salariés se déplacent selon les besoins de l’entreprise sans avoir ni à se soucier du prix de ces dépenses, ni à les avancer.
L’avantage pour l’entreprise est double ; elle limite les coûts en négociant directement avec les fournisseurs et prestataires, les prix et elle diminue le niveau de traitement des notes de frais de ses salariés.
Pour les salariés, le bénéfice est important car ils peuvent limiter d’une part les avances qui resteraient malgré tout à leur charge et d’autre part, ils sont moins exposés à la perte de justificatifs nécessaires au remboursement de leurs frais.
15 comments
Bonjour.
Je quitte mon entreprise avec 18 ans de bons et loyaux services.
Dans mon solde de tout compte j’ai la surprise de voir apparaitre le remboursement d’une avance sur frais permanente de 1500 euros.
Cette avance sur frais existait il y a bien longtemps dans mon contrat de cadre commercial entre 2002 et 2007 , elle n’existait plus sur mon contrat de VRP de 2007 à 20014 et non plus sur mon dernier contrat de cadre 2014 2019 . Etant donné que celle ci etait oubliée depuis 2008 … n’y a t il pas une prescription quelquonque ? Merci beaucoup .
Bonjour,Est-il légal qu'un employeur prétende que tous les déplacements d'un salarié effectués à partir de son domicile vers différents points du département ne sont pas des déplacements professionnels mais personnels (conséquences: pas de frais de déplacements et pas de prise en compte du temps pour se rendre sur son lieu de mission)?Bien cordialement,
Bonjour, je suis responsable des services généraux, et je dois avancer des frais pour tout type de frais et pour toutes nos agences liée à l'entreprise et non a mes deplacements proffessionnels avec ma carte bleu personnelle. Suis-je en droit de refuser d'utiliser mon compte perso pour les depenses de l'entreprise?
Bonjour, je suis responsable des services généraux, et je dois avancer des frais pour tout type de frais et pour tputes nos agences liée à l'entreprise et non a mes deplacements proffessionnels avec ma carte bleu personnelle. Suis en droit de refuser d'utiliser mon compte perso pour les depenses de l'entreprise?
BonsoirIl y a 17 ans mon employeur m'a remis une avance de frais permanente de 2000 francs. Aujourd'hui il me réclame le remboursement de 304.90 € échelonnés sur mon salire de janvier (206.46 €) et février (98.44€) . Peut il le réclamer alors que je suis toujours en poste ou doit il attentdre que hje quitte l'entreprise. Mes frais professionnels me sont remboursés tous les mois Merci
Bonjour,Le fait pour un employé de ne pas pouvoir avancer la trésorerie des déplacements professionnels, constitue-t-il un motif de rupture de contrat ?Je suis cadre et je viens d'entrer dans une société après une période d'inactivité. Je devais vénéficier d'une carte affaies, mais je ne la vois pas arriver.J'apprends même que certains collègues l'attendent depuis un an.Par avance merci pour votre réponse.Je n'ai pas les moyens d'avancer la trésorie pour un secteur géographique couvrant le quart du territoire et plusieurs nuits d'hôtel par semaine.Que dois-je faire ? La situation m'empêche de mener à bien ma mission. De plus comme je viens d'intégrer dans la société, l'employeur m'impose 3 semaines de congés sans solde au mois d'août. Est-ce légal ? (on ne me l'avait pas dit)
Bonjour,
Je suis salarié d'une société, travaillant en France mais occasionnellement amené à me déplacer à Londres pour 1 jour ou 2.
Suis je obligé d'accepter le voyage ?
Suis je obligé d'avancer les frais sur place (notamment pour payer l'hotel), ou puis-je exiger que mon employeur les régle d'avance ?
En effet, j'ai des difficultés pour me faire rembourser en totalité, en particulier les frais de conversions £/€ pour lesquels ma banque ne me donne pas de facture.
Cordialement,
Loïc
Bonjour,
Je suis engagé comme salarié en tant que commercial depuis presque 2 ans dans une société pour laquelle j'effectue de nombreux déplacements dans tout le sud-est de la France, tous les mois j'ai deux avances sur frais d'une valeur globale de 700€ cependant tous les mois j'ai entre 1000 et 1200€ de frais réels, par conséquent je suis obligé d'avancer le delta entre 300 et 500€ par mois, sachant que je gagne 1320€ net par mois cela devient très très compliqué, d'autant plus que les 300 ou 500€ ne sont remboursés que vers le 25 du mois suivant et qu'il faut sans cesse relancer pour en avoir le remboursement cela devient très pénible !!! que puis je faire pour que cela cesse définitivement ?
merci pour votre réponse – bien cordialement
Bonjour David, Je ne sais pas si vous avez eu une réponse à votre question depuis, mais la réponse est clairement non. L'employeur ne peut vous faire payer des contraventions en prélevant sur votre salaire ou vos frais professionels (cf. pourvoi 11-27550). Le titulaire de la carte grise (l'entreprise dans ce cas là) doit assumer le PV (C.route, art. L121-3 et L 121-2). Pour être exonéré, l'employeur peut soit prouver qu'il n'était pas au volant (ex.: vol du véhicule) ou soit dénoncer l’auteur véritable de l’infraction. Dans ce cas, c'est au salarié de payer directement la contravention. Sous peu, l'employeur sera obligé de vous dénoncer: autrement dit vous aurez à régler le PV directement. Concernant les "frais de gestion", là aussi c'est clairement interdit, non pas par le Code de la Route, mais par le Code du Travail: Article L1331-2).
Bnsoir,
Jai un véhicule de fonction et il m'arrive d'avoir des PV de stationnement.
Mon employeur, ce qui me parait normal, me demande de les payer. Mais en plus, ce dernier fait payer 12€ de frais de gestion par infraction qu'il déduit des notes de frais mensuelles des salariés. Une telle pratique est-elle légale ?
Merci par avance de votre retour
Je vous invite à prendre directement contact avec le service commercial si vous souhaitez souscrire à l'un de nos abonnements permettant d'accéder à notre service d'assitance juridique en ligne. Le blog n'offre en effet pas cette option directement. Le service est joignable au 01 79 75 22 26 ou par email à devis@osezvosdroits.com. Nous avons des solutions pour les particuliers, salariés et représentants du personnel. A bientôt.
Bonjour, Depuis 6 mois je suis constamment en déplacement sur la France entière. J'ai un véhicule de l'entreprise, mais je dois avancer tous les frais : essence, hôtel, repas, autoroute…. Malheureusement, sortant d'une période de chômage très difficile, je n'ai pas de trésorerie personnelle pour avancer ces frais, et mon salaire net est de 1400.00. Donc tous les mois, je suis dans le rouge à ma banque, (80 euros de commissions d'intervention tous les mois !) parce que bien évidemment, en plus de frais de déplacement, il faut bien que je paye mon loyer, norisse et habille mes 2 ados. De plus je suis remboursé très irrégulièrement, quand j'arrive à croiser mon patron. Mon employeur fait la sourde oreiile quand je tente de lui expliquer mon problème, je lui demande une carte pour le carburant, pour l'autoroute.. pour une chaine d'hôtel ( je ne suis pas difficile) rien à faire. Y a t'il un moyen légal pour qu'il paye ou rembourse au fur et à mesure ? Je commence avec les températures qui remontent à dormir dans la voiture pour éviter d'avancer les frais, mais je suis à bout. Merci infiniment de votre réponse,
Bonjour. Votre article est très intéressant mais vous ne parlez pas du temps à réaliser la note de frais. Est ce considéré comme du temps de travail ou doit on la réaliser en dehors du temps de travail ?
Bonjour Camille,
Nous ne pouvons pas répondre au travers du blog, de cette question qui mériterait d’être davantage explicitée. De prime abord, un salarié outre des frais de mission, n’a pas en principe d’obligation à faire l’avance d’argent de cette nature. Si en amont de signer un contrat de travail, vous êtes conviée à une session de formation, il faut s’interroger sur la raison de devoir la payer ou en assurer quelques charges qui y seraient associées. Je ne sais pas où vous en êtes à l’heure actuelle, mais sachez que nous pouvons vous accompagner ; c’est notre métier.
Je vous invite si vous le désirez à souscrire un abonnement auprès de nos services afin d’avoir accès à la Hotline en illimité pour traiter de toutes ces questions relatives au droit du travail (et à d’autres disciplines du droit comme la famille, la consommation, l’immobilier…). Nous pourrons ainsi en savoir plus sur ces méthodes et ce qu’il est advenu depuis votre question.
Respectueusement,
Bonjour. Je vais intégrer mi janvier une entreprise de Télécom pour un poste de commercial. Le manager m’a annoncé que les 5 jours de formations prévus au siège de Paris serait d’une somme de 500 euros , et que je devais les avancer. Il m’a également dit que je serais rembourser. Cependant il m’a dit que je signerai le contrat en cdi le 2ème jour de formation seulement et que ma période d’essai serait de 4mois. Je lui ai dit qu il m’etait impossible davancer cette somme et il m a dit qu,ils pouvaient prendre en charge la moitie des frais, que cetait negociable. Est ce legal?