Le but des questions diverses au CE

Par Fabrice AllegoetLe 12 juillet 2015

Êtes-vous partisan en tant qu’élu des questions diverses au CE ?

Le comité d’entreprise élabore chaque mois un ordre du jour, point de départ pour que puisse se tenir valablement les réunions plénières à l’occasion desquelles, ce dernier est convoqué par l’employeur (article L2325-15 du code du travail). N’omettons pas de préciser pour bien comprendre ce qui va suivre dans cet article, que l’ordre du jour constitue le seul document précisant les attentes exprimées tant par le chef d’entreprise (président du CE) que par le comité d’entreprise par l’intermédiaire de ses membres élus. Autrement dit, un ordre du jour confus ou imprécis ne permettrait pas la tenue d’échanges suffisamment poussés en vue d’obtenir de réelles informations.

L’ordre du jour doit être résolument précis

Quel est le premier rôle de l’ordre du jour ? Il a pour vocation de soumettre aux parties concernées, les sujets qui vont faire l’objet d’une étude approfondie en séance plénière. Certains dossiers seront abordés uniquement dans le cadre du droit à l’information du comité d’entreprise (article L2323-6 du code du travail) ; c’est le cas notamment lorsqu’il est question du turnover, des cotisations sociales, de la santé économique et comptable de la société…. D’autres le seront en respectant le cadre légal de la consultation, offrant au comité d’entreprise, l’opportunité de rendre un avis quant à un projet que l’employeur ambitionne pour l’entreprise (article L2323-4 du code du travail).

Ces discussions sont importantes et participent à la qualité des échanges entre le comité d’entreprise et la direction ; celle-ci peut alors anticiper grâce à l’ordre du jour, la préparation des réponses et la recherche de solutions qui pourront être soumises à l’instance du CE.

Il est donc essentiel que l’ordre du jour exprime très clairement, les attentes du CE de même que celui-ci aura à cœur de savoir sur quels sujets, l’employeur souhaitera l’interpeller. Chacune des parties pourra ainsi mieux se préparer en amont afin d’être en capacité de nourrir logiquement le débat qui s’en suivra lors de la réunion ordinaire ou extraordinaire.

Soulignons qu’un point n’ayant pas fait l’objet d’une inscription à l’ordre du jour du CE ne peut pas être abordé lors de la réunion ; ainsi, il n’est pas possible pour le comité d’entreprise de délibérer sur une question qui ne présente pas de lien avec l’ordre du jour de la réunion (Cass. soc. 15 janv. 2014, n° 12-25.468).

La rubrique « questions diverses au CE » est un fourre-tout

Une curieuse habitude a pris possession de nombreux comités d’entreprise qui perpétuent une tradition consistant à mentionner sur leur ordre du jour (à chaque réunion), une rubrique fourre-tout plus connue sous l’appellation de : questions diverses. Personne avant la réunion ne sait de quoi il sera question ce jour-là et donc personne ne peut préparer une réponse de qualité. L’employeur pourrait être pris à revers s’il ne sait pas à l’avance sur quoi, il risque d’être interrogé et pour quel objectif (pertinence de la demande, attente du comité). Il se pourrait même que faute d’avoir été avisé de la question suffisamment tôt, qu’il propose de reporter ce point à l’ordre du jour d’une prochaine réunion. Cela occasionne une perte de temps et la nécessité de préparer le sujet avant d’ouvrir le débat.

La justice s’en est également mêlée pour réaffirmer une position intéressante quant à l’objectivité de l’ordre du jour qui doit être le plus clair, le plus précis et compréhensible par tous.

Un ordre du jour trop imprécis pourrait déboucher sur l’annulation d’un avis consultatif du comité d’entreprise. Il est impératif que les élus tout comme l’employeur s’obligent à bien préciser les demandes portées à l’ordre du jour afin que tout le monde sache de quoi il va être question lors de la réunion du comité d’entreprise (Cass. soc. 24 juillet 1984, n° 83-12.030).

La typologie des « questions diverses au CE »

Quelle est la nature des questions diverses au CE ? En général, elle correspond à une demande individuelle soit en lien avec la personne qui la pose soit en rapport avec une situation concernant un salarié en particulier.

Une telle question n’aurait-elle pas méritée d’être discutée collectivement en réunion préparatoire afin que le comité d’entreprise adopte une stratégie commune pour obtenir de l’employeur les réponses attendues ?

Il semble que non. Certainement parce que ces questions sont jugées d’une part comme mineures et d’autre part comme n’intéressant pas la collectivité. Il est peut être intéressant de savoir si ces questions ont réellement un lien avec le rôle économique et social du comité d’entreprise. En effet, lors des réunions ne peuvent être traitées que des sujets inhérents aux prérogatives de cette instance. Aussi, si ces questions n’entrent pas dans ce périmètre de compétence, elles ne devraient pas être abordées.

Est-ce pertinent de recourir aux « questions diverses au CE » ?

Compte tenu de ce qui a été précisé ci-avant, la réponse est résolument « non ». Toutefois pour en être convaincu, demandez-vous si ces questions sont en lien avec les prérogatives du comité ;

1) est-ce un sujet d’information-consultation ?

2) le sujet concerne t’il plusieurs salariés (service, entreprise) ?

3) quel est l’objectif du comité au travers de cette question ?

4) cette question nécessite-t-elle que l’employeur y réponde précisément ?

5) le comité attend-il de la réponse qu’elle soit appuyée par un écrit, un engagement ?

6) cette question ne pouvait-elle pas être traitée comme un point précis de l’ordre du jour ?

Il n’existe finalement aucun sujet dont le traitement par le comité d’entreprise implique de recourir à une question diverse. Le risque étant que la réunion se ternisse par des échanges individualisés entre les élus et l’employeur.

Bien souvent, ces questions n’ayant pas fait l’objet d’une préparation préalable, les discussions sont creuses et les décisions absentes du débat. Par ailleurs, si le groupe n’est pas intéressé par certaines questions, certains élus pourraient décrocher de la réunion et discuter entre eux alors même que la séance ne sera pas levée.

En conclusion :

Le recours aux questions diverses au CE est limitant, inutile et désorganisant. Le caractère imprécis voire hors sujet de telles questions est clairement incompatible avec la clarté et la précision, essentiels à la qualité des débats qui découleront de l’ordre du jour. Nous vous conseillons dans un souci de transparence et de pertinence du débat de ne pas succomber à ce fourre-tout.

Auteur de l'article: Fabrice Allegoet

Fabrice ALLEGOET est un formateur confirmé et certifié en droit social qui s'est spécialisé dans différentes matières (santé et sécurité au travail, RSE et développement durable, management et communication en entreprise). Il est l'animateur des Podcasts "Le CSE En Clair" et "Le Droit de Savoir by CÉOS".